L’outlet, un levier stratégique pour l’omnicanalité

Alliant l’opportunité des prix discountés du e-commerce à une expérience en magasin de plus en plus semblable à celle du réseau original, le magasin outlet apparaît comme un choix idéal pour le consommateur ...

Quand on parle omnicanal, surgissent immédiatement à l’esprit les liens de convergence ou de divergence entre le site Internet marchand et le réseau de magasins premiers dit parfois ’ full price’. Néanmoins, le réseau outlet des marques s’impose de plus en plus comme le troisième pilier de l’omnicanalité.

Alliant l’opportunité des prix discountés du e-commerce à une expérience en magasin de plus en plus semblable à celle du réseau original, le magasin outlet apparait comme un choix idéal pour le consommateur qui peut alors se demander l’intérêt d’aller dans une boutique ‘full price’.

Est-ce un danger ou une opportunité pour les marques? Quelle stratégie adopter ?

 

Pour la plupart des marques, le réseau outlet est devenu un canal à part entière. Sous la pression des opérateurs, l’aménagement des magasins est proche voire similaire au design du réseau d’origine. Les équipes outlet sont maintenant souvent incluses dans les programmes de formation prévus pour l’ensemble des canaux. Les magasins outlets ont leur fichier client, bénéficient des opérations régulières organisées par les opérateurs et créent leurs propres animations. Tout le monde est conscient que le client est omnicanal et que son attente de service est la même partout. 
Même si certaines marques, surtout de luxe maintiennent une politique de la séparation étanche en interdisant par exemple aux opérateurs de villages de communiquer sur leur nom, d’autres, telles que celles du groupe SMCP, ont misé sur la visibilité et ont décidé d’installer des magasins outlets dans les zones de chalandise préférées de leur cible, proche des boutiques ‘full price’ comme la rue de Sévigné ou la rue de Marseille à Paris.

Sur des sites tels que celui de Ash, la page d’accueil oriente soit vers le site e-commerce, vers le réseau physique ‘full price’ avec un géolocalisateur ou vers l’outlet en assumant la complémentarité des offres.

Partons des deux comportements de clients outlets : ceux qui peuvent être clients des boutiques de ‘première vie’ et vont en outlet pour saisir des opportunités et ceux qui ne peuvent accéder à la marque que grâce aux outlets. Suivant le positionnement des marques, il est possible qu’un même client soit dans l’une ou l’autre catégorie.

Pour les premiers, l’objectif sera de ne pas les décevoir pour garder le lien avec la marque et les encourager à revenir dans le réseau d’origine. Les seconds ont souvent un grand attachement à la marque avec un statut identitaire fort. Même si leur pouvoir d’achat les confine au réseau outlet, la marque doit faciliter leur accès au réseau ‘première vie’ ne serait-ce que pour des occasions exceptionnelles (anniversaire, célébrations…)

L’intérêt à court terme des villages et celui des marques sont divergents même s’ils se rejoignent sur la satisfaction client. Les opérateurs veulent des points de vente équivalents à ceux des réseaux d’origine dans un environnement parfois éloigné mais souvent plus agréable. Les plus dynamiques et haut de gamme rivalisent d’imagination pour créer des événements, des défilés, des animations souvent à l’attention des enfants, qu’ils complètent par des actions de promotion et de communication. Grâce à leur vaste base de données, les centres captent autant leurs habitués que les acheteurs occasionnels pour qu’ils multiplient leurs visites avec ce même message : ‘Le même service beaucoup moins cher, pourquoi aller ailleurs ? ‘. Certains même affirment : ‘soyez tendance avec les collections précédentes’.

Pour les marques, l’enjeu est crucial car l’affaiblissement du réseau de première vie non seulement remet en cause la viabilité de la marque et donc, son apport en innovation et en créativité, mais également celle de son réseau ‘seconde vie’ dont la dynamique est corrélée à sa notoriété et à son unicité.

Il est donc vital d’établir une stratégie de complémentarité claire pour les clients et les équipes.  

Rien n’est envisageable sans des équipes outlet reconnues et motivées. La vente et la relation client sont plus difficiles dans un point de vente où les stocks ne sont pas toujours prévisibles et où le trafic est généralement dense. Les équipes doivent rester impliquées après un long moment de manutention souvent plus lourd qu’en réseau retail. Bien sûr, les équipes de vente doivent être chaleureusement pro-actives pour garantir une homogénéité d’accueil avec le réseau d’origine vis-à-vis d’une clientèle plus volatile, mais surtout experte en gestion multi-clients et en vente substitutive dans un réseau où les stocks sont caractérisés par des profondeurs disparates selon les tailles.

Les équipes doivent donc être formées spécifiquement et valorisées pour garantir la présence d’excellents profils dans ce réseau. Les vendeurs doivent se sentir assez engagés pour inciter les clients à se rendre dans le réseau d’origine, par exemple en remettant un lookbook de la nouvelle collection. 

Pour les managers, l’exigence est la même car les rotations de stocks, l’importance des équipes et la densité du trafic requiert un sens de l’organisation et de l’action très développé. L’organisation des marques outlets ayant été moins structurée, les responsables ont souvent acquis une grande autonomie. En général, les marques opèrent actuellement une reprise en main car la cohérence entre les points de vente nécessite des plans d’actions précis mais là encore il faut les meilleurs profils qui ne peuvent s’assurer que par de la reconnaissance et des formations propres aux caractéristiques du réseau outlet.

Les directions générales doivent donc être présentes et à l’écoute des équipes outlet tout en soulignant leur contribution et leur apport à la vitalité et au développement de la marque par ses autres canaux.

Portée par une équipe outlet réceptive et impliquée, des actions transversales seront conçues pour amener le client à apprécier et fréquenter le réseau ‘première vie’ avec une communication claire et concrète de ses bénéfices sur chacun des canaux : le e-commerce, l’outlet et le réseau d’origine.

Dans ce cadre, les outils de clienteling sont également très utiles en outlet pour établir une passerelle entre les deux réseaux. Les données clients enregistrées dans l’un peuvent ainsi être reprises dans l’autre, notamment de l’outlet vers le réseau première vie. Ainsi les deux cibles, celle qui fréquente les magasins ‘full price’ et celle qui n’ose pas ou ne sent pas les moyens d’acheter, pourront être confortées dans la valeur ajoutée du réseau d’origine et des produits toujours plus innovants et créatifs qui y sont présentés en exclusivité.


Eric Pestel

Co-fondateur de ]LOOKADOK[

Société internationale de formation dédiée à l’optimisation du point de vente.

twitter : @ericlookadok / Wechat : ericlkparis / eric.pestel@lookadok.com

 

Cet article reprend l’intervention d’Eric Pestel lors du 8ème Magdus, colloque européen des outlets, qui s’est tenu le 29 septembre à Paris www.magdus2016.com